Autobiographie - Loin du Vietnam

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Surprenante autobiographie que celle de Nguyen Van Thanh. Saïgon-Marseille, aller simple raconte son parcours d’engagé volontaire dans un camps de travailleurs en France.

On doit au journaliste Pierre Daum d’avoir porté à la connaissance du grand public cet épisode peu glorieux de la colonisation française en Indochine : le recrutement forcé de 20 000 hommes  contraints de quitter leur pays pour venir travailler en France à la veille de la Seconde Guerre mondiale et ce jusqu’en juin 1940 dans des usines à risque, où la main d’œuvre (les ouvriers non  spécialisés, ONS) manipulait la poudre des munitions et des explosifs destinée à l’armée.

Après de longues et douloureuses péripéties, certains d’entre eux purent revenir au pays, d’autres choisirent de rester en France. Tel fut le cas de Nguyen Van Thanh. Au soir de sa vie, ce­lui-ci  décide de rendre comp­te de son parcours pour le moins mouvementé – sans aucun sou­ci de faire de la littérature, car son récit était uniquement destiné à sa descendance. Jusqu’à ce que le texte  parvienne par un heureux hasard à Pierre Daum, ravi de l’aubaine, car il apportait de très précieux compléments d’information à sa propre enquête.

Qualité humaine

Et il est vrai que le récit de Nguyen Van Thanh, entrepris en 2001 alors qu’il avait quatre-vingts ans, est étonnant à plus d’un titre. Il est tout d’abord d’une extraordinaire précision et  contribue ainsi à l’histoire scandaleuse de ce que l’on appelle la Main d’œuvre indigène (MOI). Ensuite, la destinée de cet homme a de quoi surprendre.

Fils d’un mandarin, devenu sous-préfet « indigène » placé sous l’autorité d’un fonctionnaire français, Nguyen Van Thanh est l’un des rares Vietnamiens à n’avoir pas été enrôlé de force, mais à  avoir absolument voulu quitter sa famille, à cause de la désunion de ses parents. C’est en tout cas, notamment dans la description de ses années de jeunesse au Vietnam, un document d’une rare  richesse, un tableau de la vie décrite non plus du côté des colons mais de celui des colonisés.

Enfin et surtout, on ne peut qu’être touché par l’extraordinaire qualité hu­maine du narrateur. Homme d’une honnêteté qui confine presque, à certains moments, à de l’innocence ou de la naïveté, sa seule idée après les années noires d’errance de camps en camps, alors qu’il est devenu ouvrier dans une usine de la banlieue parisienne, après des années de galère, est de pouvoir « faire son  devoir » envers sa femme, Juliette, et ses enfants.

Épousant la cause de l’indépendance de son pays, notamment auprès des catholiques, alors qu’il n’est pas croyant, il se retrouve en profond porte-à-faux avec le reste de sa famille vietnamienne.

Tout cela contribue à faire de Saïgon-Marseille, aller simple un document rare.

Saïgon-Marseille, aller simple, Nguyen Van Thanh, Elytis Édition, 300 p., 20 €

Par Jean-Pierre Han

(source media: www.temoignagechretien.fr)
 

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