La traversée du Vietnam en Honda Win

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La traversée du Vietnam en Honda Win

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Enora, motarde et prof de yoga à Paris, avait envie d'un break. Décidant de vivre ses rêves plutôt que rêver sa vie, elle vend son appartement pour se lancer dans un voyage ''sans limites'' et nous raconte sa traversée du Vietnam sur une Honda Win 110 cc.

Episode 1 : lâcher prise...
 
Je m'appelle Enora, 27 ans dans quelques jours. Je travaillais à Paris en tant que coach sportif pour des clubs et des particuliers (plutôt sur des massages et de la "réhabilitation"). J'ai passé pas mal d'années sur les bancs des universités et travaillais en parallèle.

C'est à la suite d'un voyage en Thaïlande en mars dernier que j'ai senti le déclic. Il était temps de revoir ma vie, non plus la rêver mais vivre mes rêves, notamment de voyage, de rencontres, d'expérience. J'ai senti que j'avais besoin d'aller plus loin, de rester plus longtemps dans les pays, d'ouvrir mes limites et ne plus me cantonner à de simples voyages avec but prédéfini (formation prof de yoga, de massage thaï...) et à durée déterminée (par les obligations de mon travail).

Repousser d'autres limites

Mon métier et ma formation en sport-études m'ont amené à repousser maintes fois mes limites physiques. Maintenant je désire repousser bien d'autres limites personnelles, notamment ce fameux "lâcher prise", cette confiance en soi, envers les autres, envers la vie.

J'ai donc démissionné, refusant au passage l'opportunité qui se présentait à moi de devenir manager de salle. J'ai quitté mon appartement, vendu et donné des tas d'affaires. Mon voyage débutait en m'allégeant, en me détachant de tas de choses matérielles qui ne m'apportaient finalement pas de réel bonheur... Tout pays, toute guest-house sera alors ma maison, je pars pour un voyage à durée indéterminée à l'écoute de mes désirs...

Une destination me tient particulièrement à coeur : l'Australie. Depuis longtemps je rêve de pouvoir m'exprimer naturellement en anglais et c'est une réelle clef pour espérer travailler à l'international, communiquer. J'ai donc fait la demande de visa "vacances-travail", une belle opportunité offerte aux jeunes !

L'Australie, mais sans billet d'avion !

Ensuite, je décide de couper le trajet (moins cher, plus fun et envie de découvrir un peu plus l'art de vivre à l'asiatique). Je décide donc de rejoindre une amie qui vit à Bangkok pour de la détente sur une île et partager notre amour commun du yoga. La suite s'écrira progressivement en écoutant les uns et les autres.

Et je n'ai volontairement pris aucun billet d'avion pour l'Australie, pour justement me laisser l'opportunité de suivre mes envies en Asie.

Ce sera donc d'abord le Laos (ses montagnes, ses rivières, ses villes à la française...), puis je lorgne sur le Vietnam. Ce pays m'intrigue, j'entends des avis très partagés et je lis qu'il est assez fréquent de le parcourir à moto !

Mon coeur palpite à l'idée de retrouver la liberté de la route, le plaisir de la conduite et... un peu de solitude. J'ai en effet passé mon permis moto en France il y a environ deux ans et j'ai envie de retrouver ces sensations.

Ce périple semble un peu fou à réaliser et d'autant plus seule... Mais ce doux mélange de peur et de folie m'appelle et le challenge me plaît ! Ça promet d'être sacrément exotique, sauvage, magique, fort, déroutant...

Laos, Vietnam, Cambodge

Je finirai ma boucle d'Asie au Cambodge, au temple d'Angkor, pour la magie, la beauté et la spiritualité qui semble en émaner, que j'apprécie particulièrement.

Laos, Vietnam, Cambodge : il y aurait 1000 façons de parcourir ces trois pays, 1000 choses à faire, 1000 choses à voir... Le champ des possibles est immense lorsque l'on voyage en roue libre ! Ces possibilités illimitées m'ont parfois angoissée, mais finalement m'apprennent à être encore plus à l'écoute de moi, de ce que je désire réellement vivre et lâcher prise.

Je voulais surtout éviter tout aller-retour d'une ville à l'autre, en recherchant plutôt une avancée fluide. Alors j'ai choisi ce parcours, cette boucle du nord vers le sud, qui me permettait d'avancer continuellement vers ce que je pourrais appeler la cerise sur le gâteau : Angkor...

Episode 2 : acheter une moto à Hanoi
 
C'est au Laos, tout au nord, installée dans un rudimentaire bungalow en bambou, face à la rivière et aux montagnes, que je me décide à rejoindre le Vietnam.

J'ai vécu ici des expériences très sympas, notamment un trek fantastique au cours duquel j'ai découvert ma réaction aux piqûres de guêpes après trois morsures au mollet : douloureux mais encore en vie (merci à la gnole du pays : quelques rasades à la fin du repas et tu oublies toute notion de douleur !)

Mais je fatigue de ma dépendance aux bus et du côté très touristique, façonné pour les jeunes "backpakers", de certaines villes.

J'ai bien pensé rejoindre le Vietnam par le nord et ses montagnes (réputé pour ses rizières et ses petits villages), mais j'ai cette envie pressante de vivre mon roadtrip à moto et d'aller chercher la mer, qui me manque terriblement ! Alors, quel est le meilleur endroit pour acheter une moto ? Hanoi, bien sûr !

Il me faut donc retourner à Luang Prabang (Laos) pour y prendre un bus de nuit et rejoindre enfin Hanoi. 24 heures de voyage prévues... plus de 30 au final (une longue attente inexpliquée au poste frontière, des routes chaotiques, bref : les aléas des trajets en bus...)

Quand le bus démarre, honnêtement je ne sais pas où je vais ni ce qui m'attend là bas... Aurais-je vraiment le courage de réaliser ce délire à moto ? La peur est là, bien présente. Celle de me faire arnaquer lors de l'achat de la moto, celle d'avoir un accident dans ce trafic citadin de fous ou sur les routes avec les nombreux camions, de me perdre, etc., etc.

Mais je me dis que j'ai le temps et le temps est un luxe ! Ca me permettra notamment, peut-être, de rencontrer quelqu'un avec qui rouler.

Mais dans quoi je m'embarque !?

Dans ce bus, j'échange quelques mots avec un anglais qui lui-même discute avec un couple de français. Ce couple réalise un tour du monde et leur prochaine étape est... Hanoi, pour acheter une moto et descendre jusqu'à Saigon ! Lucky me ! Le hasard fait bien les choses...

Le feeling passe super bien et c'est décidé je me joins à eux. J'envisage donc au moins la première partie du voyage plus sereinement. Tout simplement ravie !

Néanmoins, le trajet en bus sur la partie vietnamienne ne me rassure pas trop : je découvre des routes en totale construction, poussiéreuse, un trafic intense, des règles de conduite quasi inexistantes, les deux-roues gentiment klaxonnés à tord et à travers pour qu'ils se poussent sur le bas-côté... Mais dans quoi je m'embarque !?

Dès le lendemain, nous nous mettons à la recherche de nos motos... Il y en a des tas dans les rues où son situés les hôtels pour "backpakers". Pas facile de choisir... On y va donc au feeling ! Ce sera 250 $ par moto avec casque, rack, tendeurs, cadenas, carte (inutilisée parce que Google Map est bien plus pratique) et... bière inclus !

Je reste encore très admirative de ma compagne de voyage. Elle a appris à conduire une moto juste quelques semaines auparavant au Cambodge avec son copain et malgré les redondants calages au beau milieu du trafic fou de Hanoi (pas facile de passer cette fameuse première vitesse qui nécessite tact et finesse), elle persiste et parvient à ramener la moto du garage (pour la pseudo révision) jusqu'à notre hôtel !
 
Episode 3 : Hô-Chi-Minh... Honda Win !
 
Je décide de rejoindre Hô-Chi-Minh (Saïgon), capitale économique du Vietnam, pour y revendre "facilement" la moto à un autre voyageur. J'aime l'idée de parcourir ce pays du nord au sud. Et vu sa forme, c'est aussi le plus évident !

J'ai quelques vagues idées de ce que je souhaite voir, comme la baie d'Halong, Hoi an et Hué (deux charmantes villes côtières). Pour le reste, je n'en ai aucune réelle idée... Si ce n'est le désir de rouler proche de la mer, à la découverte de petits coins paradisiaques (mer, plage, soleil, cocotiers...) parce qu'il m'en faut peu pour être heureuse !

Sur la première partie, honnêtement, je me suis installée en suiveuse. Les garçons géraient les points de chute, la route (guidés par le Lonely Planet et Google Map) et nous, les filles, nous laissions gentiment guider, concentrées sur la route, le trafic et mortes de rire d'être les nouvelles motardes du Vietnam !

Scooter ou Honda Win...

Concernant le choix de la moto, disons qu'il n'y en a pas 10 000 ! Scooter ou moto Honda Win sont les plus utilisés par les jeunes voyageurs. Alors déjà le scooter : même pas en rêve ! L'achat d'une Honda Win représente un budget abordable (200 à 400$ pour les plus neuves), elle est suffisamment puissante et résistante pour faire cette longue traversée, et facile de prise en main pour des débutants.

Quelques anecdotes ont bien marqué cette aventure et ça commence dès le premier jour !

La première destination est l'ile de Cat ba où nous attend un ami du couple de français. Il nous a préparé une croisière dans la baie d'Halong sur un petit bateau juste pour nous, la guesthouse à l'arrivée et... le barbecue de fruits de mer !

Nous partons donc d'Hanoi de bonne heure, avec un autre voyageur rencontré la veille et qui était dans le même bus de nuit que nous : direction Hai phong et son port.

Premiers coups de soleil, premières frayeurs avec les camions et les traversées impromptues des vélos et autres scooters au beau milieu de la route alors que nous roulons comme des furieux. J'apprends alors que les deux-roues se placent préférentiellement sur la voie d'urgence, tout à gauche, et qu'il nous faut doubler par la gauche : c'est plus sécuritaire !

Aux embranchements, nous utilisons les klaxons pour stopper ceux qui souhaitent entrer ou traverser de droite et de gauche. Le klaxon est ici préventif, sécuritaire, et fait effet de clignotant... Bref, multi usages !

Et nous voilà arrivés au fameux port ! Nous sommes dimanche et découvrons que les prix sont donc plus élevés que prévu (parce que c'est le week-end) et que les bateaux ne prennent pas de motos ! Nous parvenons à les convaincre de le faire, attendons près de deux heures le départ et montons enfin sur le bateau.

On se pose tranquillement, heureux d'avoir trouvé la solution, quand nous voyons nos motos redescendre du bateau les unes après les autres alors même que le bateau se met en route !! Nous avons juste le temps de réagir, prendre nos sacs, sauter sur le quai quand le bateau part. Nous parviendrons à comprendre que les policiers sont arrivés et ont finalement décidé d'interdire l'embarquement de motos !

Nous trouverons finalement LA solution : un port à 20 km, utilisé par les locaux, moins cher, qui acceptent les motos... Sur la route, à nouveau une belle frayeur sur le premier tronçon non goudronné, plein de trous et où je suis à deux doigts de me retrouver écrasée entre deux camions qui tentent de se doubler ! Puis c'est une route désertique au milieu d'une zone industrielle, l'occasion de prendre un peu de vitesse et de se faire plaisir...

Et puis, il y aura la magnifique traversée de l'ile de Cat ba. Route côtière en serpents sous un soleil couchant. De très belles images pour clôturer cette première virée... mais malheureusement pas de photos à l'appui car j'étais trop plongée sur mon plaisir visuel, pas le courage de sortir l'appareil !

Néanmoins, je décide de mettre un peu de piment dans cette journée (pas encore assez riche en émotions !)... et me casse la figure ! Les cheveux au vent (oui, on s'est autorisé un petit écart en décidant de laisser les casques sur les bagages !), je descends une jolie colline verdoyante et me retrouve nez à nez avec un bus qui monte, dans un virage serré, placé royalement au milieu de la route...

Première gamelle...

Je ne trouve pas d'autre issue que d'aller rouler sur le bas côté mais je perds le contrôle de la moto et décide de m'en dégager avant de tomber et qu'elle me tombe dessus (elle part à droite, je m'éjecte à gauche).

Ce sera une jolie gamelle qui me vaudra les coudes et une partie du dos rapés... Côté moto, quelques égratignures aussi : protection du phare et du clignotant avant cassés et du jeu entre la pédale de frein et le sélecteur... Malgré ça, je remonte en selle, la moto redémarre et on file vers la ville. Donc je le dis : les Honda Win sont plutôt résistantes !

A ce moment-là, je suis aussi très heureuse d'être bien entourée de mes compagnons de route qui m'ont aidé à me relever et m'ont entourée pour finir la route. Au final, plus de peur que de mal ! Et enfin, le barbecue de fruits de mer, de bonnes bières bien fraiches : la récompense de cette journée intense est délicieuse !

Pour être tout à fait honnête, à la fin de cette journée je me questionne vraiment sur la suite de ce voyage. Du matin jusqu'au soir j'ai été totalement immergée, submergée par ce nouvel environnement. La prise en main de la moto et le trafic d'abord. Puis l'incompréhension totale au premier port. Des heures d'attente et de l'énervement, était-ce dû à la difficulté de se faire comprendre ? Ou cherchaient-ils à nous embobiner pour gagner des sous ? Et finalement, la gamelle...

En fin de journée, je sens que je me suis en fait bien attaquée le dos et ça n'est d'ailleurs pas joli à voir d'après les potes...

Bref, j'ai la chance d'être bien entourée, j'ai le luxe de pouvoir stopper à tout moment, de changer mes plans, en fait, je me rappelle que je suis libre ! Cette journée est une étape, j'ai des "leçons" à en tirer et notamment garder confiance, maintenir mon cap sereinement. Les difficultés font partie du jeu et vont m'aider à affronter la suite, calmement, en prenant du recul sur les situations.
 
Episode 4 : casse moteur à Hué...
 
La suite du périple se passe bien durant plusieurs centaines de kilomètres. Juste à mentionner : de longues parcelles de route en construction donc pleines de creux, de pierres, de poussière, de flaques de boue.

C'était plutôt du moto cross jusqu'à Thanh Hoa ! Nous roulons comme des gangsters : foulard devant le visage, sacs bien ficelés à l'arrière de chaque moto, slalomant à droite et à gauche pour doubler les camions dans le vacarme infernal de nos supers Honda Win !

Nous nous posons quelques jours dans le parc national de Phong Nha, à la découverte des grottes et des rivières. Nous rencontrons ici d'autres motards qui font le chemin inverse.

C'est l'occasion de partager nos impressions, anecdotes de route (mes blessures de guerre intriguent et je ne fais pas trop la maligne...), se donner quelques conseils concernant les itinéraires, les bons coins à voir et puis partager une bonne bière locale !

Puis direction la côte, vers Hué ! Ce qui devait prendre quelques heures prendra finalement une journée ! Une des motos tombe en rade au beau milieu de la route et Julien - c'est le nom du chanceux... - se retrouve à pousser sur plusieurs mètres sa moto sous un soleil de plomb...

Finalement une camionnette s'arrête et l'emmène au village le plus proche où nous l'attendons.

Premier diagnostic dans un garage : le moteur est cassé, il faut tout changer... Prix exorbitant et évidemment, les pièces ne seront pas trouvables avant un moment ! Nous décidons de voir ce que ce diagnostic vaut et allons questionner un autre garage. En effet, problème au niveau du moteur mais prix plus légitime et environ deux heures de réparation.

Café-restaurant familial
 
Nous trouvons donc un super spot dans un café-restaurant familial pour profiter du soleil en attendant (avec hamac, s'il vous plaît !). Le temps passe et nous allons à tour de rôle voir l'avancement, curieux de découvrir une Honda Win totalement mise à nue.

La réparation sera plus longue que prévu et nous décidons de dormir ici pour repartir tranquillement le lendemain matin (nous étions dès le départ tous d'accord sur l'idée de ne rouler que de jour). En fin de journée, la moto est comme neuve et la prochaine étape est donc jouable !

Je garde au final un excellent souvenir de cette journée : comment tourner une situation a priori peu rigolote en un moment de convivialité. Ça a été une belle occasion de mieux connaître mes compagnons de route, de se laisser embarquer dans des échanges plus intimes et de passer du bon temps avec la famille qui tenait le restaurant.

Enfants, parents, grands-parents vivent sous le même toit et participent chacun à leur façon au business familial. Et malgré nos différences linguistiques (seule une jeune fille parle quelques mots d'anglais), je passe une excellente journée sous le signe des sourires, des rires et puis simplement du silence, être les uns avec les autres sans expectative.

Episode 5 : rencontre et changement de planning
 
Après Hué, nous descendons tranquillement par la côte vers Hoi an et ne stoppons pas à Danang. Ce sera alors vadrouille dans la vieille ville, délicieux repas dans le marché, etc.

C'est ici que nos chemins vont se séparer. Le couple de français n'a plus que quelques jours pour rejoindre Ho Chi Minh et s'envoler pour la Thaïlande. Leur voyage autour du monde leur impose une certaine organisation et des timings précis dans chaque zone...

Ca m'amuse d'ailleurs toujours autant d'écouter les uns et les autres parler de leur voyage, comprendre comment ils le créent, le vivent...

Bref, j'apprendrai par la suite que leur moto made in China est encore tombée en panne au beau milieu de nulle part...

Pour ma part, je reste encore une journée à Hoi An avec l'autre motard et je me prépare à faire la suite seule, parce qu'il doit s'envoler aussi d'ici quelques jours de Danang pour rentrer au pays. Mais une belle rencontre va changer mon planning !

Un soir, alors que je récupère ma moto au garage (changement du frein arrière qui était quasi inexistant et du compteur qui avait décidé de s'arrêter de compter - trop de kilomètres à chiffrer, peut-être ?), nous rencontrons une jeune française qui sirote un café froid sur le trottoir.

La discussion débute, cette fille me plaît, elle est détendue, semble super à l'aise ici, rayonnante, et pour cause : elle arrive à la fin d'un stage de quatre mois à Danang, au sein du prestigieux resort international "L'intercontinental" ! Son coup de coeur pour cette ville, pour le resort (les conditions exceptionnelles de travail et d'évolution, notamment) et pour ce pays me touche et je décide de reporter ma descente vers le sud pour aller découvrir Danang de l'intérieur.

J'y passe finalement deux semaines. D'une part, la demande d'extension de visa prend une dizaine de jours et d'autre part, j'ai envie d'en savoir plus, de me sentir un peu chez moi. La jeune française quitte la ville deux jours plus tard et c'est avec un grand pincement au coeur que je lui dis au revoir...

Les jours qui suivent, je poursuis ma découverte de la ville et je retrouve ses ami(e)s, collègues, vietnamiens et étrangers pour un café, une bière le soir dans les bars branchés. Ce sera deux semaines très fortes et inoubliables.

J'ai rencontré ici des jeunes avec le coeur sur la main, avec une ambition et une détermination qui ne vont pas au détriment de leur bien-être et du respect de l'autre. Ils sont jeunes, ils voient grand, ils n'ont pas peur et ils aiment la vie !

Toute cette énergie me booste et j'ai même pensé un moment rester dans cette ville pour y travailler... Mais bon, pour faire court sur mes discussions intérieures, je décide finalement de reprendre la route. Je dois finir cette traversée du Vietnam et je dois le faire seule, quelque chose au fond de moi m'appelle à vivre mon voyage intérieur...

Episode 6 : voyage en solitaire
 
Toute la suite du voyage, je la cadre sur ces quelques points : pas plus de 200 km par jour, pas de conduite de nuit, m'arrêter à tout moment (pour prendre une photo, respirer, boire un café, regarder la vie autour de moi...) et trouver une chambre face à la mer (en hauteur si possible pour admirer le lever du soleil).

Shavasana sur la plage

J'ai un petit rituel qui se met en place quand j'arrive dans une ville : aller directement vers la plage, juste pour regarder au loin la mer, puis m'allonger de tout mon long sur le sable et perfectionner ma posture du cadavre (shavasana, bien connue en yoga pour récupérer en fin de cours ou simplement totalement relâcher son corps, détendre l'esprit...).

A l'occasion de mes pauses plages, il y a aussi le rituel des jeunes étudiants vietnamiens (filles, garçons) qui viennent vers moi pour me demander de parler anglais ensemble. C'est amusant, moi qui me sous-estime constamment vis-à-vis de mes connaissances linguistiques, je me retrouve à "enseigner" ! J'aurais même l'occasion d'intervenir pendant un cours d'anglais ! Expérience extraordinaire et qui me redonne confiance !

Et puis, il y a ces rires, ces regards amusés quand je m'arrête dans un café en bord de route. Certains même osent me toucher la peau et me recommandent de me couvrir plus pour ne pas bruler mes bras, me touchent les cheveux (oui, bien blonds !).

Je lis dans leur regard (parce qu'ils ne parlent pas un mot d'anglais et que je n'arrive pas bien à apprendre le vietnamien !) de l'étonnement. A plusieurs reprises, en effet, j'ai l'occasion de réaliser que c'est un voyage assez audacieux - voire fou - et symbole d'indépendance, en totale opposition avec ce que les locaux vivent ici.

En les questionnant, j'apprends que pour la plupart ils n'ont jamais voyagé à plus de 100 km à la ronde et ne connaissent en fait que très peu le Vietnam. Quant à conduire seule, de plus une fille, sur une moto ! C'est juste impensable ! Ici, c'est un scooter pour quatre ou bien le bus pour rejoindre la ville la plus proche.

Je découvre aussi beaucoup de soutien, d'encouragements et chaque fois que je quitte une ville, je sens ma sensibilité à fleur de peau.

Côté pratique, j'ai la chance de ne rencontrer aucun sérieux problème sur la route. J'ai bien eu mes pneus crevés mais chaque fois j'étais arrivée en ville quand le pneu se dégonflait complètement. Un tour au garage, quelques euros et le tour est joué, on the road again !

Je me suis aussi "paumée" une fois et me suis retrouvée au milieu de la campagne dans des petits chemins de terre... Expérience amusante ! Mais au final, on n'est jamais vraiment perdu dans ce pays, il y a toujours des locaux dans le coin pour vous indiquer la route principale.

Finalement, pour toute la seconde partie de mon voyage, je pense que les photos parleront bien plus que mes mots. Et puis j'encourage chacun à construire son propre voyage en fonction de ce qu'il cherche et veut découvrir, voir, ressentir...Pour ma part, j'avais un grand besoin de solitude, de prendre un bain de nature, de me laisser enivrer par la conduite, les longues routes plates sur lesquelles je peux bombarder ou les routes de montages où je me laisse balancer, quelques fois sans les mains pour pimenter le tout !

Revendre la moto... ou pas ?

Le voyage se termine à Hô-Chi-Minh, il est temps de revendre la moto... Quoique...

Je me pose dans le quartier vivant de la ville, réputé des voyageurs, bondé d'agences de voyage et de scooters, motos à vendre ou à louer. La revente ne s'annonce pas facile, d'une part parce que nous sommes en basse saison (plus de motos que de voyageurs en recherche) et d'autre part, je réalise vite que ma moto est en bien moins bon état que les autres (en apparence, car ce n'est que la peinture qui s'est un peu barrée avec le temps).

Il va donc falloir faire appel à mes qualités de vendeuse de rue, alpaguer le voyageur et puis surtout baisser mon prix (de 250$, prix d'achat, je descendrais à 200$).

Je vais d'abord rencontrer deux jeunes australiennes. Elles sont à deux doigts d'acheter deux merdiques scooters. D'abord par soutien entre routards, je les oriente gentiment vers la Honda Win (le scooter c'est pour la ville, point final !). Je leur vends les mérites de cette charmante bécane, sa facilité de conduite, sa résistance, son réservoir de 7 litres permettant de rouler pendant près de 300 km, le porte-bagages à l'arrière etc., etc. et leur propose d'essayer la mienne !

Je les laisse réfléchir, elles sont un peu stressées, pressées par le proprio de leur guesthouse qui veut leur vendre ses scooters. Je décide donc de faire ma vie et de découvrir la ville, d'aller au musée de la guerre notamment, et je me prendrai la tête plus tard sur la vente de ma moto.

J'ai le temps...

Le soir, en rentrant à ma guesthouse, je les vois et comprends qu'elles ont finalement bien penché pour l'achat d'une moto... et qu'elles ont acheté celle d'un de mes voisins de chambre ! La vente m'est passée sous le nez !

D'abord je me maudis de ne pas avoir été présente et puis après je relativise, tant mieux pour lui, il décolle demain matin et moi, j'ai le temps !

L'idée me viendra de continuer à rouler, pour aller découvrir le bout du bout du Vietnam et même rejoindre le Cambodge avec ma moto ! Ca semble "risqué", les avis diffèrent sur les blogs, il se peut que je rencontre des problèmes à la frontière, et inversement certains ont passé la moto sans encombres...

Après une bonne nuit de sommeil, je décide que je vais faire ça : tenter l'aventure vers le Cambodge ! Je suis heureuse, ambitieuse quand j'ouvre mes mails et reçois un message d'un ami d'un ami : "j'arrive ce jour à Ho Chi Minh, j'ai appris que vous vendiez votre moto, je suis hyper intéressé et souhaite partir dès le lendemain". Bon... je me torture un peu la cervelle et finis par lui vendre la moto. Ce sera 200$ pour aller découvrir le Cambodge... tranquillement installée dans un bus !

Vivre ses rêves !

Pour conclure cette aventure vietnamienne, je ne pourrais qu'encourager ceux qui désirent vivre un roadtrip dans ce pays de le faire. Je confirme : c'est safe, il y a des garages partout et les prix sont vraiment très bas.

Et puis, comme partout dans le monde, vous rencontrerez des gens, plus ou moins accueillants, vous vivrez des moments plus ou moins difficiles, le temps sera de la partie ou non... Bref, vivre ses rêves est pour moi l'un des plus beaux projets qui puisse exister dans la vie et qui ouvre des portes inimaginables.

J'ai pris ce risque, je suis restée consciente et sécuritaire et je suis heureuse d'avoir découvert tant de vie, d'émotions, de plaisir et d'envie au fond de moi... Qu'importe la destination : la route est longue, la route est belle, elle est symbole de liberté.

(Source info: www.moto-net.com)

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