Hong : Itinéraire complexe d’une « poussière de vie »

Témoignage. Hong Dagognet, fille d’un militaire américain et d’une Vietnamienne retrace son histoire.

Pièce après pièce, Hong Dagognet a rassemblé les éléments de son passé : amérasienne, fille de la guerre du Vietnam, arrachée à son pays, à sa famille et à son frère jumeau.

Son véritable prénom, son âge exact, son histoire, le visage de sa mère, celui de son frère jumeau… Tout cela Hong Dagognet ne l’a découvert que très tard dans sa vie. Cette mère de famille installée à Feillens, à côté de Mâcon, continue encore d’assembler lentement le complexe puzzle de sa vie. Bientôt, elle s’envolera pour les États-Unis, pour rencontrer à 43 ans son frère jumeau dont elle a longtemps ignoré l’existence.Le parcours de Marie-Claire « Hong » Dagognet se confond avec l’Histoire. Comme des milliers d’enfants nés au Vietnam à la fin des années 60, elle est le fruit de l’union en 1968 d’un employé américain de l’armée et d’une Vietnamienne. Ses parents se sont rencontrés sur une base militaire. Pour la population vietnamienne, ces enfants amérasiens, Americano-vietnamiens sont des « Bui Doi » : des poussières de vie. Une expression faussement poétique qui cache en réalité tout le mépris qu’ont les locaux pour ces métisses symboles de la trahison nationale. Tout cela, Hong l’a su bien après.

Le Vietnam, puis la France…
Petite fille, sa mère la confie pendant la journée aux bons soins d’une famille de Français installés au Vietnam. La jeune Hong qui ressemble tant à leur enfant disparue est pour eux comme une nouvelle fille. De cette époque, elle ne garde que quelques images confuses et des souvenirs qui se réveillent au contact de certaines odeurs : « Comme celle du kérosène qui me rappelle la base américaine. » Un matin, elle a 7 ans, la famille qui l’heberge rentre soudainement en France et emmène la petite fille avec elle Le soir, sa mère découvrira, impuissante, la disparition de sa fille. Elle mettra près de 25 ans à avoir de ses nouvelles. C’est donc bien loin de l’Asie, dans un petit village de l’Ain que grandit la fillette. On la rebaptise « Marie-Claire », elle est convaincue d’être Française. Les doutes viendront quelques années plus tard.

Une lettre rédigée en vietnamien
En 1998, la vie de Marie-Claire bascule. Elle reçoit une lettre. Le courrier est rédigé en Vietnamien, une langue que parle la jeune femme, mais qu’elle ne lit pas. « C’est là que j’ai pris conscience qu’il y avait quelque part dans le monde quelqu’un qui me recherchait depuis plus de 20ans ». Très vite, elle fait traduire la lettre par un commerçant lyonnais. « En lisant, il s’est mis à pleurer. » L’expéditeur n’est autre que sa mère, qui réclame des nouvelles de sa fille. Le timbre est américain. La maman de Hong et son frère jumeau ont bénéficié d’un programme de rapatriement et se sont installés aux USA pour refaire leur vie. Au bas de la lettre un numéro de téléphone. Il faudra à Marie-Claire deux mois pour trouver le courage d’appeler. Les deux femmes se parlent enfin et au mois d’avril 1999, sa mère vient lui rendre visite en France. « Elle m’a raconté mon histoire », relate-t-elle avec émotion. « Je croyais avoir 29 ans, elle m’a expliqué qu’en fait j’en avais 31. » Elle découvre aussi son vrai prénom « Hong ». « Ma mère m’a dit : maintenant que j’ai retrouvé ma fille, je peux mourir tranquille. » Les deux femmes mettent pourtant un peu de temps à s’apprivoiser : « Pour moi c’était comme une étrangère. » La crise d’identité commence alors avec ses interrogations, ses doutes, ses colères. « Quelque chose en moi disait : on m’a volé ma vie ! Et ce sentiment, même si je n’en parle pas, ne me quitte jamais. »
Le sort difficile des « poussières de vie »
Cette confusion, elle n’est pas la seule à la connaître « c’est le cas de la plupart des amérasiens ». En France, ils ne sont qu’une poignée, mais sur Internet une véritable communauté des « poussières de vie » s’est construite. « C’est peut-être encore plus dur pour les enfants de soldats noirs américains », raconte Hong. Au Vietnam, ces métisses sont bien souvent rejetés, en Europe et surtout aux États-Unis, ils ont aussi du mal à trouver leur place. « Ces gens-là ont été oubliés. » Au Vietnam nombreux sont ces « visages de la honte » qui cherchent encore à regagner « leur pays », les États-Unis. « Mais, même loin du Vietnam, je sais que mon frère a subi le racisme. »En 2004, elle se rapproche véritablement de sa mère lors d’une visite en Californie. « Et là ça a été le déclic, les sentiments sont apparus. » Un an après, Hong trouve le courage de s’envoler pour son pays de naissance : le Vietnam. Là-bas, elle rencontre les premières enfants de sa mère. Ses demi-sœurs se jettent immédiatement dans ses bras et s’occupent d’elle comme d’une princesse. « En descendant de l’avion, j’avais l’impression d’avoir mis un pied dans mon berceau ». Sur place, sa mère lui fait visiter la maison de sa naissance ou encore sa toute première école. Un choc : « Je ne savais plus vraiment qui j’étais. »

Elle voit son jumeau le mois prochain
Il ne reste désormais plus qu’une étape pour assembler définitivement toutes les pièces du puzzle : faire la rencontre de son frère jumeau aux USA. Le 15 mars, Hong s’envolera à nouveau pour les États-Unis. En attendant, ses deux cultures cohabitent déjà dans sa maison de Feillens. Aux côtés des bibelots ramenés d’Asie, elle a planté des petits drapeaux américains envoyés par des vétérans rencontrés sur Internet. Quand elle leur écrit, elle signe de son vrai prénom : Hong. « C’est mon histoire, j’en suis fière. »

Le journal de Saône et Loire

Commentaires

MADEMOISELLE HONGV

vous êtes FORMIDABLE
et je souhaite de tout coeur que poussièrs de vie deviennent des graines et des fleurs de BONHEUR
félix dada

Ma devise : risque tout et vois ce que le sort amène et Garde les hommes et les femmes de coeur
Nouveau Envoyer à un ami