Danse du Ventre à Hanoi?

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La danse orientale à Hanoi: coulisses d'un succèsUn engouement aux accents féministesUn show-business prometteur

La danse orientale à Hanoi: coulisses d'un succès

En 2006, la danseuse coréenne Ara Hwang débarque au Vietnam et ouvre les premières classes de bellydancing (danse du ventre) à Hanoi. Formée par une danseuse turque, elle espère transmettre sa passion pour la danse. "J'ai reçu un accueil très froid" se souvient-elle, "mes premières élèves étaient persuadées qu'elles n'arriveraient jamais à bouger gracieusement, et hors de question pour elle de montrer leur ventre".

Alors Ara décide de monter sa troupe. Elle choisit six élèves motivées et les entraîne tous les jours pendant deux mois avec l'objectif de préparer un spectacle. La suite ressemble à un scénario hollywodien: au sortir du show, une soixantaine de femmes l'attendent. Elles veulent à leur tour apprendre les chorégraphies orientales.

Pourtant, la partie n'était pas gagnée. Nombreuses élèves assistent à leurs premières classes sans l'accord de leur époux ou de leurs parents, figures d'autorité dans beaucoup de familles au Vietnam.
"Mon mari n'est pas du tout favorable à ses classes, il trouve que ce n'est pas convenable. Et pour le cacher à mes beaux-parents j'ai dit que je prenais des cours d'aérobic! », confie Vinh, 32 ans. "J'avais moi-même des aprioris assez négatifs sur la danse du ventre, je pensais que c'était une danse de call-girl, pour les bars" se souvient-elle. "Mais j'ai été séduite par les mouvements gracieux et la musique. Cette danse m'a rendue plus féminine." Élève du studio Apsara depuis 3 ans, Vinh poursuit son apprentissage en dépit des désaccords familiaux.
Ces cinq dernières années, de nombreuses femmes ont rejoint Ara et ses disciples, devenues professeures à leur tour. Une dizaine de nouveaux studios ont ouvert leur porte. Aujourd'hui plus de 1200 hanoiennes s'investissent dans des cours de bellydance. 

Un engouement aux accents féministes

Dans sa démarche, Ara Hwang attache beaucoup d'importance aux racines des chorégraphies qu'elle enseigne. Jusqu'à traduire les paroles de la chanteuse égyptienne Oum Khalthoum afin de danser au plus juste les sentiments de la diva.

"La maturité donne de la force à l'expression corporelle". Pour prouver que la danse du ventre n'est pas réservée aux plus jeunes, Ara monte le trio "Hoa Sen" (fleur de lotus) qui rassemble des femmes d'une cinquantaine d'années, toutes mères, dynamiques et investies dans la danse.

Phuong Tao, 48 ans, est membre de Hoa Sen, elle pratique la danse en plus de ses activités de coiffeuse. Sa fille de 12 ans, Quyen, aimerait elle-aussi devenir danseuse professionnelle. En attendant, elle s'entraîne chaque jour sur des rythmes orientaux.

Bien sûr, toutes les danseuses n'ont pas l'expérience de l'âge, la spontanéité de l'enfance... Les difficultés peuvent alors ressortir au moment d'assumer leur passion en public. Pour les habituer, le studio Apsara organise un festival chaque année, et les représentations informelles sont fréquentes:

"Certaines femmes n'ont pas l'habitude d'exprimer leurs sentiments. La danse devient alors un moyen de lâcher prise, de s'exprimer librement", analyse la professeure, coordinatrice du spectacle, Ara.
 

Un show-business prometteur

Depuis la naissance du studio Apsara en 2006, de nouvelles écoles ont fait leur apparition: l'Olympia Club, l'Esmeralda, le Life Art... Ces écoles comptent quelques anciennes élèves d'Ara mais aussi des entrepreneurs aux ambitions plus rémunératrices.

Parmi les plus gros studios, l'ISIS attire environ 800 femmes à la recherche d'une heure de sport et d'un moment glamour. La carte d'abonnement coûte 600,000VND pour dix cours (environ 22 euros). Ici, toutes les élèves ne connaissent pas exactement les origines de la danse du ventre. L'apparence est soignée. Loin des revendications féministes, la danse du ventre véhicule aussi cette image sexy dont les marques sont si friandes. Dernièrement, la Bao Viet Insurance Company, le Cung Xuan hôtel ou encore Nokia ont pu commander leur propre représentation événementielle.

Les codes de la danse du ventre au Vietnam restent à inventer, entre inspirations orientales et nouveau folklore lucratif. Qui seront les danseuses de demain?

Un reportage de : - Manon Aubel en collaboration avec Joelle Firzli -
Photographe française installée à Hanoi 

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