La Francophonie dans le contexte culturel vietnamien

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La Francophonie dans le contexte culturel vietnamien

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Les pays francophones du monde entier célèbrent chaque année la Journée internationale de la Francophonie (20 mars). Photo : Phuong Vy/VNA/CVN

Le terme «francophonie» créé en 1880 par O. Reclus désignait «l’ensemble des populations parlant français». Un siècle plus tard, son extension sémantique aboutit à une nouvelle définition : «ensemble culturel fondé sur l’usage du français comme langue commune et partageant une communauté de valeurs et d’intérêts».

Il est de toute évidence que la définition originelle, purement linguistique, ne cadre pas avec la situation et la nature de la francophonie au Vietnam. Le Vietnam est tout d’abord vietnamophone, et 60-70% des vocables vietnamiens sont empruntés à la langue chinoise Hán. Au temps de la colonisation française, parmi les 5% de la population alphabète, une petite élite et les fonctionnaires des villes parlaient français. Depuis la fin de la guerre de trente ans (1946-1975), l’enseignement du français connaît un véritable regain. Mais le français ne peut pas concurrencer l’anglais, langue du business international.

Nouvelle définition du terme «francophonie»

La nouvelle définition du mot «francophonie» dépeint mieux l’espace francophone au Vietnam et justifie l’adhésion de l’État vietnamien à la Francophonie en 1987. Parce qu’elle souligne aussi la communauté culturelle et implique des «intérêts éventuels» (politique, diplomatique, économique...).

Pour le présent et dans un proche avenir, la francophonie au Vietnam revêt un caractère plus culturel que linguistique. L’ancienne ministre de la Francophonie, Margie Sudre a parfaitement raison de souligner qu’elle est une question d’âme et une volonté de préserver une certaine identité culturelle.

Jusqu’à la naissance du Vietnam moderne après la Révolution de 1945, la culture vietnamienne a trois composantes essentielles : la souche sud-est asiatique relevant de la civilisation du riz, sur laquelle se sont greffés la culture chinoise et des apports hindous, souvent de manière indirecte, et la culture française (occidentale).

 Margie Sudre a affirmé : «La Francophonie n’appartient pas au passé, elle s’inscrit dans l’avenir au Vietnam». Je voudrais ajouter que la colonisation française a pris fin depuis un demi-siècle, mais la culture française demeure dans le présent vietnamien, tout comme la culture chinoise, notons que la colonisation chinoise avait pris fin depuis un millénaire.

 Nous pourrions faire une comparaison. Aujourd’hui, rares sont les Français qui puissent déchiffrer le grec ou le latin. N’empêche que la culture gréco-latine fasse partie de la chair et du sang de la culture française actuelle. Il en est de même avec la culture vietnamienne en connexion avec les cultures chinoise et française.

L’acculturation, phénomène très complexe

 La culture française implantée au Vietnam (1858-1954) est un passé vivant. Sa sève continue avec la culture chinoise de féconder la culture vietnamienne puisqu’elle fait partie de l’organisme culturel vietnamien. «Dans l’histoire vietnamienne plurimillénaire, l’histoire coloniale qui dura moins d’un siècle est une péripétie mais qui a des conséquences considérables en coupant les liens traditionnels avec l’empire du Milieu et en faisant entrer le Vietnam dans l’ère de la civilisation moderne» (Charles Fourniau).

L’acculturation, phénomène très complexe inhérent à la colonisation, a un côté positif et un côté négatif. Quoiqu’il en soit, la culture autochtone Viêt, enrichie par les apports chinois, a créé de nouvelles valeurs au contact de la culture occidentale représentée par la France. Après le départ des Français et en dépit du rôle moins important de la langue française, ces nouvelles valeurs ne cessent de vivre et de se développer. L’essence de la culture française, souvent invisible, se manifeste dans tous les domaines : politique, éducation, sciences sociales et naturelles, littérature, architecture, peinture, théâtre, musique, gastronomie, structure de la pensée.


Beaucoup d’intellectuels, ingénieurs, médecins, professeurs, artistes ont perfectionné leurs connaissances apprises chez les Français pour servir avec succès la guerre de résistance contre les Français et les Américains, et la reconstruction nationale. Le capital culturel français, partie intégrante de notre identité, doit être préservé et se développer. La francophonie lui offre un terrain de choix.

 La francophonie «partage une communauté de valeurs et d’intérêts». Au terme de laborieuses recherches, l’historien japonais Y. Tsuboi a conclu que la pensée de Hô Chi Minh, fondateur du Vietnam contemporain, est axée sur le républicanisme français avec sa devise «Liberté-Égalité-Fraternité». Avec les autres peuples francophones, nous partageons l’universalisme de la pensée française. À l’aube du XXIe siècle, nous devons nous unir pour lutter contre une mondialisation qui pourrait causer l’homogénéisation culturelle, ensemble nous devons lutter pour favoriser la diversité et le dialogue des cultures au service de la paix et du développement.

La communauté linguistique et l’affinité culturelle nous permettront aussi de nous entraider face aux problèmes politiques, économiques et culturels d’ordre international. Concernant les relations extérieures, le Vietnam a choisi un triple engagement : intégration mondiale, régionalisation avec l’ASEAN et francophonie.

En conclusion, pour comprendre la nature et la position de la francophonie vietnamienne, il faut l’étudier dans le processus de la genèse de la culture vietnamienne dont la culture hexagonale est une composante organique.

Huu Ngoc/CVN

(Source media: Le Courrier du Vietnam)
 

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