L’extrême Nord du Vietnam

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Un coin du bourg de Mèo Vac, district éponyme au nord de la province de Hà Giang. Photo : Minh Tâm/VNA/CVN

Mon regretté ami, le Docteur Nguyên Khac Viên (1913-1997), a parcouru de son vivant tout le pays, du Nord au Sud. Il lui est arrivé de dire en plaisantant : «Un Vietnamien qui n’a pas encore mis les pieds à Dông Van et Mèo Vac n’en est pas un !»

Ce n’est qu’à la fin d’un automne 2001, qu’avec des amis du Fonds culturel Danemark-Vietnam, j’ai visité un district de l’extrême Nord, dans la province de Hà Giang bordée par la Chine. Les montagnes et hauts plateaux se profilent dans le lointain. La route en lacets, pleine de corniches, donne le frisson, surtout quand elle est en travaux. Elle monte ou descend, entre falaise et ravin. Le spectacle de ces montagnes primitives, les plus escarpées du Vietnam, me remet en esprit la boutade de Nguyên Khac Viên. Il voulait sans doute simplement souligner le mérite de nos ancêtres qui, durant une lutte millénaire, ardue, acharnée, ont réussi à planter une borne frontière au village Lung Cu de Dông Van, afin d’y déloger le poteau de bronze du général chinois Ma Yuan (1).

Tandis que les voitures filent sur la route asphaltée Tuyên Quang - Porte du Ciel (Công troi) de Quan Ba, je me rappelle mon voyage à pied, 50 ans en arrière sur cette même route. C’était en 1950, en pleine guerre contre les colonialistes français. J’étais dans l’armée et j’escortais un convoi d’anciens soldats européens et africains du corps expéditionnaire, ralliés à notre cause. Ils allaient à pied, en suivant des pistes de montagne pendant des mois, pour atteindre un village du Yunnan, en Chine. Là, ils seraient recueillis par les pays socialistes de l’Europe de l’Est.

Nouvelle physionomie des provinces du Nord

Quel changement ! Au lieu d’un chemin mal empierré, cahoteux, c’est aujourd’hui une route asphaltée qui berce l’automobiliste. Au fond des vallées profondes, dans les chefs-lieux de district, des édifices publics et des bâtiments en dur construits par la population remplacent les vieilles paillotes délabrées. Hà Giang, comme sa voisine du sud Tuyên Quang, est une province de la rivière Claire (sông Lô), un affluent du fleuve Rouge, située dans la haute région, peuplée de 750.000 habitants. Elle compte 22 groupes ethniques. Le groupe Viêt n’occupe pas la majorité. Les H’Mông (ou Mèo) vivent dans quelques dizaines de maisons situées entre 800 m et 1.600 m d’altitude. Originaires du Sud-Ouest chinois, ils se sont installés ici il y a quelques centaines d’années. Ils cultivent le maïs, auparavant l’opium, et élèvent des porcs.


Des Dao au pantalon serré, domiciliés dans la commune de Thanh Phat, province de Tuyên Quang, préparent des offrandes pour présenter à l’autel des ancêtres. Photo : Quang Cuong/VNA/CVN

Les Dao (ou Man) apparentés aux H’Mông, vivent au Vietnam depuis le XIIIe siècle. Les costumes féminins sont très pittoresques. Les différents groupes sont nommés selon les détails vestimentaires féminins : Dao au pantalon serré, Dao au pantalon blanc, Dao à la veste bleue, Dao à sapèques, etc. Vivant à une altitude inférieure à celle des H’Mông et pratiquent la culture du riz en terrain sec. Les Tày, de la famille ethnolinguistique Tày-Thai, se sont ralliés aux anciens Viêt dès la période des rois Hùng (fondateurs de la nation) de l’âge du bronze. Ils sont d’excellents planteurs de riz, habitent des maisons sur pilotis au pied de la montagne près des sources ou dans les vallées. Chaque village comprend de 20 à 70 foyers.

À Hà Giang, l’ensemble artistique de la province présente un programme de musique et de danse pluriethnique. Deux numéros sont originaux. La danse rituelle «Lap tinh» des Dao exécutée à l’occasion de la cérémonie d’initiation des filles et garçons dans le monde des adultes. La danse du feu des Pà Then fait partie du rituel de la purification. Mais il est regrettable que la chorégraphie ait été un peu gâtée par une modernisation à la mode occidentale.

Au district de Bac Quang, nous visitons un hameau de Pa Theng (à Tân Trinh) de la famille ethnolinguistique H’Mông-Dao. Venus de l’autre versant de la montagne, ils se sont établis ici depuis quelques décennies. Sédentarisés, ils vivent de la culture du riz et des oranges, de la pisciculture et de l’apiculture, même du commerce des motos. Certains ont fait fortune. Le président de l’association locale des paysans a pu en cinq ans construire une maison de plus de 100 millions de dôngs.

Tout près du chef-lieu du district H’Mông de Mèo Vac se trouve un village de Lô Lô. Cette minorité ethnique fait partie du groupe tibéto-birman de la famille ethnolinguistique sino-tibétaine. Ils employaient les idéogrammes chinois dans la littérature religieuse et officielle. Ils cultivent le mais, la moutarde, les concombres, les haricots, le piment, l’ail sur les pentes et même au creux des rochers. Les tambours de bronze (par couples yin-yang) sont leur apanage. Ils sont enterrés et sont déterrés à l’occasion des cérémonies ou des événements solennels.

Huu Ngoc/CVN

(Source media: Le Courrier du Vietnam)

Note : (1). Après avoir conquis le Vietnam (en l’an 43), Ma Yuan fit élargir ce poteau à la frontière pour perpétuer le souvenir de la servitude du pays.
 

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