Quand les Chinois vont acheter leur femme au Vietnam

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Quand les Chinois vont acheter leur femme au Vietnam

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  Kiab [le prénom a été changé], une jeune victime hmong , vit désormais avec une dizaine d'autres femmes dans un foyer créé par l'Etat vietnamien pour les rescapées de trafics
 
La Chine manque de femmes, politique de l'enfant unique oblige. Et certains hommes n'hésiteraient pas à aller chercher des fiancées, moyenant bon prix, dans les régions pauvres de l'autre côté de la frontière. Plusieurs milliers de jeunes filles seraient victimes de ce trafic d'êtres humains.
 
Quand Kiab [le prénom a été changé] a eu 16 ans, son frère lui a proposé de l'emmener faire la fête dans une ville touristique du nord du Vietnam. Au lieu de cela, il l'a vendue comme fiancée à un Chinois. Comme bien des Laotiennes, Cambodgiennes et Vietnamiennes, cette adolescente est une victime collatérale de la politique de l'enfant unique en Chine.
 
Celle-ci impose aux familles chinoises de n’avoir qu’un seul enfant. Alors, elles préfèrent avoir un garçon, qui perpétue la lignée et le nom de famille.

Et surtout, qui reste vivre avec ses parents quand la fille, elle, part vivre chez sa belle-famille. Depuis l’instauration de la politique de l’enfant unique en 1979, la Chine a totalisé 330 millions d’avortements. Dont beaucoup ont été motivés par une échographie prénatale annonçant un bébé de sexe féminin. Entre 1980 et 2010, alors que l’équilibre naturel voudrait qu’il y ait à peu près autant de naissance de filles que de garçons, il y a eu 38 millions de petits garçons en plus que de petites filles, causant l'un des pires déséquilibres démographiques au monde.
 
Résultat : il n'y a pas assez de femmes pour ces millions d'hommes célibataires en surnombre. Alors certains vont faire leur marché de l'autre côté de la frontière, en faisant appel aux trafiquants d'êtres humains. Ces derniers les aident à trouver des fiancées vietnamiennes, moyennant un bon prix, dans les communautés pauvres du nord du pays. Les autorités ont enregistré près de 1000 victimes de trafiquants en 2013, dont 70% à destination de la Chine. Mais nul ne connaît le nombre de Vietnamiennes retenues en Chine contre leur gré. Le même phénomène est observé à travers l'Asie du sud-est par les défenseurs des droits de l'Homme. « Ce problème a été largement passé sous silence par les autorités chinoises », accuse Phil Robertson, de l'ONG Human Rights Watch (HRW).
 
Mariées ou prostituées
 
Les filles peuvent être vendues jusqu'à 5000 dollars comme fille à marier ou prostituées dans des bordels, selon Michael Brosowski, de la fondation Blue Dragon Children, qui a secouru 71 femmes depuis 2007 au Vietnam. « Les filles sont trompées par des gens qui se prétendent leurs petits amis ou leur offrent du travail », précise-t-il, alors que de nombreuses femmes rencontrées ont été vendues par leur famille, comme Kiab. Selon les experts, de nombreuses Vietnamiennes sont contraintes de se prostituer en Chine. Mais, de crainte d'être ostracisées de retour au pays, elles disent avoir été mariées de force. Dans la ville frontalière de Lao Cai, travailleurs et commerçants traversent quotidiennement la ligne de montagnes qui sépare sur 1350 km la Chine du Vietnam. Nombre d'entre eux la passent illégalement et les trafics en tout genre – volailles, fruits ou femmes – y prospèrent.
 
Les filles pauvres et non éduquées, premières victimes
 
« Les femmes qui sont victimes de trafic viennent souvent de régions montagneuses isolées. Parce que nous ne sommes pas informées », confirme Lang, 18 ans, vendue à une famille chinoise par un « ami ». La population de ces régions craint pour la sécurité des jeunes filles. « Je suis si inquiète à cause de cela, comme toutes les mères des villages. C'est déjà arrivé à de nombreuses filles », soupire Phan Pa May, doyenne de la communauté de Red Dao.
 
Les autorités vietnamiennes ont pris le problème en charge depuis quelques années. Le refuge de Lao Cai, ouvert en 2010, a secouru des dizaines d'entre elles. Mais la source du problème reste l'extrême pauvreté des communautés montagnardes. Et le défaut d'éducation, dans ces villages qui, souvent, ne parlent pas le vietnamien. Le gouvernement vietnamien a lancé un programme de sensibilisation dans ces régions, afin d'inciter les jeunes filles à se méfier des inconnus. Mais, quand les trafiquants sont des membres de leur propre famille, le combat est plus difficile.
 
« Mon frère n'est plus un être humain à mes yeux, parce qu'il m'a vendue, moi, sa propre soeur, à la Chine », raconte Kiab à l'AFP. Cette adolescente, dont le prénom a été changé, a passé près d'un mois dans sa « belle-famille » en Chine, avant de réussir à fuir. Les policiers chinois l'ont renvoyée vers le Vietnam, où elle vit désormais avec une dizaine d'autres femmes dans un foyer créé par l'Etat pour les rescapées de trafics, comme elle. « J'avais beaucoup entendu parler de trafics. Mais je ne pouvais pas imaginer que cela m'arriverait à moi. Que mon propre frère me tromperait. »
 
(Sources info: AFP - madame.lefigaro.fr)
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