Poivre vietnamien

Vous êtes ici : Dossiers » Economie » Poivre vietnamien

Economie

Poivre vietnamien

Agrandir le texte
Réduire le texte
Imprimer
Envoyer à un ami

Poivre vietnamien: La qualité est déterminante© Centre du commerce international, Forum du commerce international - No. 4/2004 Ces cinq dernières années, le Viet Nam est devenu le plus gros exportateur de poivre du monde. Le CCI a accompagné ce pays au cours de ce processus, en l’aidant à en améliorer la qualité. Cela a représenté une augmentation appréciable du revenu des familles paysannes, surtout celui des femmes sur lesquelles repose cette activité. L’ accent porté sur la qualité a apaisé les craintes des producteurs qui redoutaient que du poivre de mauvaise qualité et bon marché ferait baisser les prix internationaux.

Le Viet Nam a expérimenté une rapide transformation pour devenir le leader des exportateurs mondiaux de poivre noir; il occupe à présent une position idéale pour s’affirmer sur le marché mondial des épices. La crainte que du poivre vietnamien bon marché et de mauvaise qualité allait inonder les marchés internationaux, entraînant la baisse des prix mondiaux, s’est révélée infondée. En réalité, l’amélioration de la qualité du poivre au Viet Nam, obtenue grâce à l’aide du CCI, a au contraire permis aux prix des exportations du pays de grimper jusqu’à 50% par tonne. Les autorités vietnamiennes soulignent que cette supposition était contraire à la politique du pays et que l’augmentation des revenus prouve que la qualité paie. L’industrie vietnamienne du poivre a bénéficié d’une compréhension et d’une meilleure appréciation du fait que les exigences de qualité pour les importations de produits alimentaires sur les grands marchés sont toujours plus strictes. Le pays a su se repositionner avec succès sur le marché international des épices en améliorant tant la qualité de ses produits que son image. Les prix plus élevés des récoltes ont amélioré le niveau du revenu des ménages ruraux, ce qui a entraîné une différence de qualité de vie, surtout pour les femmes, sur lesquelles l’industrie nationale du poivre s’appuie. Les familles impliquées dans la culture, la récolte et la vente du poivre ainsi que les grossistes ont pu s’extraire du cercle vicieux de la pauvreté rurale, laquelle génère des récoltes de mauvaise qualité entraînant une baisse des prix, qui à leur tour sont insuffisants pour améliorer la qualité des récoltes suivantes

Une demande croissante

Ces cinq dernières années, le CCI, en collabora- tion avec le secteur du poivre et des épices du Viet Nam, a insisté sur la nécessité d’améliorer et de stabiliser la qualité du poivre, stratégie dont le succès s’est clairement vérifié avec une demande croissante de ce produit. Le Viet Nam, qui ne cultivait que 15 000 hectares de poivre en 1999, a triplé cette surface et atteint une récolte de 75 000 à 80 000 tonnes en 2003. Milieu 2004, les exportations s’élevaient déjà à 60 000 tonnes, une augmentation qui a placé le Viet Nam en tête des exportateurs de poivre dans le monde, dépassant ainsi les exportateurs traditionnels comme le Brésil, l’Inde, l’Indonésie, la Malaisie et le Sri Lanka. En plus du poivre, les plus grandes récoltes d’épices vietnamiennes sont la casse et l’anis étoilé et, dans une moindre mesure, le gingembre, le curcuma et les piments. L’augmentation de la production de poivre est due en partie à la détérioration des prix mondiaux du café, une culture importante au Viet Nam, ainsi qu’à la demande accrue, de la part de l’industrie alimentaire, de poivre noir et d’épices de qualité supérieure. L’augmentation de la production reflète aussi le potentiel, pour cette culture, d’une meilleure profitabilité en comparaison avec d’autres produits comme le caoutchouc ou la noix de cajou.  

Améliorer l’image de marque

Malgré la croissance exponentielle tant de la production que de l’exportation, le secteur vietnamien producteur de poivre noir a dû surmonter une réputation de mauvaise qualité qui aurait pu dévaloriser sérieusement les prix pratiqués sur les marchés internationaux. Dans ce pays, la production de poivre était antérieure à la guerre et a été réactivée dès la fin du conflit. Les communautés rurales connaissaient la culture du poivre, mais elles ne possédaient aucune technologie et avaient une production fragmentée. La compréhension des normes de propreté, des plans d’échantillonnage et des méthodes analytiques, nécessaires sur le marché international en croissance pour assurer la régularité de la qualité du poivre noir et d’autres épices, était limitée, voire inexistante. En travaillant avec le CCI, les producteurs vietnamiens de poivre noir ont commencé à s’attaquer systématiquement aux questions liées à la mauvaise qualité, facteur déterminant qui empêchait le prix de monter, notamment:  

  • .une production et un traitement locaux fragmentés, avec les irrégularités associées dans les normes;
  • des connaissances techniques limitées ou désuètes, qui empêchaient d’ajouter de la valeur par la transformation sur place, et
  • un sous-investissement dans les technologies de production de pointe pour ajouter de la valeur à la production.

En 2001, le CCI a lancé un programme de trois ans, financé par le Secrétariat d’État à l’économie (seco) de la Suisse, pour encourager les efforts liés à l’assurance de la qualité. L’American Spice Trade Association (ASTA) et l’Association européenne des épices (ESA) ont collaboré étroitement avec le CCI afin de permettre aux producteurs vietnamiens de résoudre les problèmes techniques qui diminuaient la qualité du poivre et de comprendre les exigences de qualité rigoureuses, et les débouchés commerciaux associés, en vue d’une pénétration réussie des marchés internationaux. En raison du coût de sa main-d’œuvre très compétitif, le Viet Nam représente une possibilité fort intéressante pour les acheteurs américains et européens à la recherche de futurs fournisseurs à bas prix et offrant des volumes plus importants de poivre et d’épices. Les normes de l’ASTA, qui traitent la dimension des grains de poivre, leur poids, le contenu volatil de l’huile et de l’humidité, constituent un véritable «passeport de qualité» pour les négociants internationaux. L'entrée de l’ASTA sur le marché vietnamien, ses contacts et son implication dans la création de l’Association vietnamienne du poivre (VPA) a été aidée par le statut du CCI, reconnu comme une organisation internationale de promotion du commerce neutre et fiable. Le programme du CCI a adopté une approche par étapes.  

  • Avec l’assistance de l’Institut vietnamien du commerce, le CCI a évalué les besoins, puis a effectué des déplacements dans les zones de production.
  • Le CCI a organisé deux ateliers, à Hanoi et à Ho Chi Minh Ville. Des experts, principalement européens et américains, ont donné aux fermiers, préparateurs et exportateurs des conseils pratiques concernant: – la première transformation du poivre, et – les étapes techniques pour assurer une qualité toujours meilleure du poivre. 
  • Une brochure technique préparée par l’ASTA, présentant des lignes directrices pour la première transformation et le nettoyage des épices, a été traduite en vietnamien et largement distribuée; elle se fonde sur le programme «Clean Spices» de cette institution. 

Des bénéfices pour les cultivateurs

L’objectif de l’évaluation, des ateliers et des visites sur le terrain visait avant tout à comprendre les avantages et les inconvénients que présentait la production locale, afin de mettre en avant les bénéfices pour les fermiers, y compris l’augmentation des revenus qui pourraient ressortir d’une culture à forte valeur ajoutée. À propos des visites sur place, M. Anthony Sandana, Administrateur principal au CCI pour les produits de base, explique: «La recherche sur le terrain nous a permis de comprendre où l’éducation et la formation auraient les effets les plus positifs. Le CCI a pu également se rendre compte de l’étendue des problèmes liés à la production, à la transformation et à l’assurance de la qualité qu’il fallait traiter pour que les producteurs vietnamiens améliorent la qualité et la régularité de leurs exportations de poivre noir vers les marchés internationaux. Ainsi, le poivre est vendu au poids, mais les paysans vietnamiens le récoltaient très tôt afin de retrouver rapidement leur investissement. Trop souvent, le poivre cueilli était encore très léger, par conséquent les cultivateurs perdaient de l’argent. Les former sur des questions de ce type peut induire des effets positifs sur le revenu final. Les aider à améliorer la qualité et l’image de leur production signifie que cette culture pérennale, récoltée en janvier et en mai, va assurer leur gagne-pain. Ces fermiers vont cultiver d’autres espèces à d’autres moments de l’année, mais le revenu du poivre noir va au moins être assuré.» M. Sandana prévoit que, d’ici à six ans, il va y avoir une forte poussée d’intérêt de la part des investisseurs pour la production de poivre et d’épices vietnamiens. «Nous verrons davantage d’alliances avec des compagnies internationales, lesquelles apporteront des connaissances et des techniques plus sophistiquées pour la culture et la transformation du poivre local, noir ou blanc», ajoute-t-il. Il est aussi convaincu que les producteurs vietnamiens eux-mêmes vont augmenter leur investissement dans de nouvelles technologies afin d’élever la qualité de leur poivre et de produire des marchandises à valeur ajoutée, telles que des huiles essentielles et des oléorésines.

Les incidences

Voici, à ce jour, les incidences concrètes du programme du CCI, appuyé par l’ASTA et l’ESA:

  • Les cultivateurs et exportateurs vietnamiens ont acquis une bonne connaissance des exigences sévères en vigueur sur les marchés internationaux, notamment celles liées à la qualité.
  • Les fermiers ont été formés à de bonnes méthodes de culture.
  • Les transformateurs sont mis au courant des méthodes de transformation.
  • Sur le conseil des experts du CCI, l’Association vietnamienne du poivre a été fondée.
  • La qualité du poivre dans son ensemble a été constamment améliorée.  

Les raisons de la transition réussie du Viet Nam vers une production de poivre noir de qualité supérieure sont notamment:

  • L’engagement des paysans pour élever la qualité du poivre.
  • L’augmentation de la demande internationale de poivre du Viet Nam.
  • La disponibilité de main-d’œuvre bon marché.
  • Des profits plus élevés pour les cultivateurs de poivre en comparaison avec d’autres produits tels que le café, le caoutchouc ou la noix de cajou.
  • La création de la VPA, qui a joué un rôle actif dans l’amélioration de la qualité et est reconnue comme correspondant pour la promotion des exportations de poivre du Viet Nam.  

La création de la VPA À la suite des ateliers organisés par le CCI, l’ASTA et l’ESA au Viet Nam et des visites sur place en janvier 2001, l’idée a été suggérée que les producteurs nationaux devraient créer une association pour mieux défendre leurs intérêts et servir de correspondant pour les acheteurs internationaux à la recherche de récoltes de poivre dans le pays. Sous la direction du CCI, la Viet Nam Pepper Association (VPA) a été inaugurée en 2001, avec 45 membres. L’objectif principal de la VPA est de proposer une guidance à ses membres en ce qui concerne les marchés d’exportation, les normes et le contrôle de la qualité et les techniques de production. L’association offre aussi ses services d’arbitrage. Son rôle va gagner en importance au fur et à mesure de la croissance exponentielle des exportations vietnamiennes de poivre, ainsi qu’avec l’interaction croissante avec les grands partenaires commerciaux en Europe, au Japon, en République de Corée, à Singapour (où se fait une grande partie du nettoyage, de la transformation et de la réexportation) et aux États-Unis. Comme le relève M. Anthony Sandana, du CCI, «les clients ont toujours plus confiance dans la qualité du poivre vietnamien et certains l’achète même directement. À la longue, la totalité du poivre sera nettoyée et transformée au Viet Nam.»Texte: Alison Clements-Hunt

 

Nouveau Envoyer à un ami