En Occident, on fête les anniversaires de mariage, les naissances, les victoires souvent, les défaites rarement, les morts seulement à la Toussaint où les cimetières se métamorphosent en immenses champs de chrysanthèmes.

Chez nous, les décès sont importants. Les enterrements sont aussi festifs que les mariages. On invite la famille, les voisins, les proches, les moins. La musique bat son plein (on notera parfois la présence d’orchestre), le cercueil est multicolore, on festoie beaucoup, on mange beaucoup, on boit également, non pas pour noyer la tristesse dans l’ivresse, mais en souvenir du défunt. Ce n’est pas de la joie que l’on exprime, mais du respect. Pendant ce temps-là, le disparu s’éloigne sereinement. Du côté bouddhiste de ma famille, on s’interdit de pleurer en présence du mort pour ne pas le retenir. Et dans la tradition, la veuve et parfois les enfants portent un voile sombre un certain temps.

Chez nous aussi, et ça vous choque parfois, on photographie les morts, on les fait revivre dans les albums photos, on les place sur des autels fleuris et enluminés, ornés de fruits et autres présents. J’ai connu quelques arrière-grand-parents et grandes tantes comme cela. Sur du papier mat, en noir et blanc, dans de grands albums écornés par le temps.

Au Vietnam, sur l’autel de mon grand-père, on a laissé un paquet de Craven-A pour qu’il revienne en griller une de temps à autre. Il ne fumait pas, mais je crois que ça lui ferait plaisir. A table, on l’appelle parfois à grailler avec nous, une assiette supplémentaire disponible, parfois même remplie de nourriture. Ca n’a rien de glauque, d’effrayant ou même de fou. C’est comme ça. La mort ne fait pas peur, fait partie de la vie, depuis toute petite, elle fait partie de nos histoires de famille frappée par des disparitions multiples et diverses, tragiques, prématurées, maladives, naturelles, sur lesquelles on verse parfois une larme, mais l’on transmet le plus souvent le souvenir des défunts avec beaucoup de ferveur et d’égards, comme un hommage permanent.

Aujourd’hui je suis rentrée à la maison. Hier, ça faisait un an, Un premier anniversaire. Un an déjà qu’il est parti. Et j’ai ce souvenir qui me hante, d’avoir raté son départ, lui en fin de vie, ma soeur et moi sur l’autoroute.

On a allumé quelques bougies sur son autel, lui avons laissé un bol de soupe et ma grand mère lui a demandé de venir partager le repas avec nous.

Ce n’était pas triste, je ne sais pas comment l’expliquer. De toutes façons, pour moi il est toujours là, où qu’il soit.

Pépé, on pense à toi.

source: http://www.unsushidansmonlit.com/tag/traditions/

Voir aussi notre dossier: Le culte des Ancêtres

Commentaires

Ton article

J'ai beaucoup aimé apprendre ces rites qui m'ont beaucoup touchée. Preuve des liens forts au delà de la mort. Merci

Un cortège funéraire au Vietnam

Bonjour,

Merci pour cette description qui , concorde avec la réalité !
Effectivement, au Viêt Nam, comme dans d'autres pays, à la mort les traditions sont très différentes de celles de l'occident.
Ces traditions commencent à se faire plus discrète dans les villes , néanmoins la culture maintient encore ces traditions.
Même pour les enterrements catholiques, il y a un respect des traditions culturelles.
Bonne journée,
Amicalement
trimpeun

Ma devise : La sagesse commence dans l’émerveillement. Socrate

MERCI AMI POUR CES

MERCI AMI POUR CES EXPLICATIONS;SOUMIS DERNIEREMENT AU DECE DE MA COMPAGNE JE N4AI PAS COMPLETEMENT APPREHANDE CETTE TRADITION BOUDHISTE VIETNAMIENNE AUTOUR DU DECE;MAIS M'A T ON DIT PARFOIS LES FUNERAILLES SONT COORDONNEES AVEC UN CALENDRIER BOUDHISTE?.QU'EN PENSE TU?.
ET UNE PERSONNE PEUT ELLE ORGANISER SA MORT EN FONCTION DE CELA?.
J'AI MILLE QUESTIONS QUI TROTTENT DANS MA TÊTE ,QUELQUES ECLAIRCISSEMENTS SERAIENT LES BIEN VENUS MERCI

Un cortège funéraire au Vietnam

Bonjour CHERCHEUR1000

Merci pour ton courriel,
Hélas pour le commun des mortels, en cas de mort naturelle, choisir sa date et heure de mort , reste dans le domaine de l'utopie !!
Par contre certains grands maîtres du bouddhisme qui ayant atteint le " nirvana" ,peuvent choisir le moment de leur mort ainsi que choisir leur réincarnation.
Pour faire court, voici en résumé les principes.
Dans le cas d'une mort naturelle, il n'est donc pas possible de choisir le jour de sa mort, dans le bouddhisme, un moine de la pagode (à laquelle la famille est rattachée)conseillera à la famille le jour et l'heure favorable pour l'enterrement. Pour ce choix il se basera pour partie sur le calendrier chinois.
Il en sera de même pour les anniversaires de la mort : 49 jours, 100 jours, une année etc..c'est le moine qui déterminera quel est le jour favorable pour ces cérémonies.
Bonne journée,
Amicalement,
Trimpeun

Ma devise : La sagesse commence dans l’émerveillement. Socrate

MERCI AMI,tu ne peut savoir

MERCI AMI,tu ne peut savoir combien ta réponse m'éclaire sur les circonstances du décé par suicide de ma compagne?..en fin de vie elle a peut être mis fin à sa déchéance en fonction justement de ce calendrier boudhiste/chinois.mais cela est il permis dans la religion boudhiste vietnamienne?.encore merci de tes explications.chercheur 1000

Un cortège funéraire au Vietnam

Bonjour Chercheur1000,

Merci pour ton courriel.
Dans le Bouddhisme, la vie est un bien précieux que nul ne doit prendre ou détruire.
Le suicide n'est pas admis dans le bouddhisme comme dans les autres religions.
Au Viêt Nam quelque soit la religion, le suicide même pour les raisons que tu évoques, n'est pas légal.
Cependant pour le rite funéraire, il peut parfois exister une tolérance , pour atténuer cette action néfaste, afin que le déshonneur n' entache pas la famille survivante.
Bonne journée,
Amicalement
Trimpeun

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