Do Anh Tuan: rencontre avec un photographe vietnamien  

Le hasard fait bien les choses…

Le nez pas vraiment accroché à un vieux guide de voyage, je me perdais gentiment dans le dédale des rues du vieux centre de Hanoi. Puis je me suis retrouvée devant un cliché en noir et blanc. Je n’en décolle pas. Une vieille femme.

J’étais devant une galerie de photos, voilà qui tombait très bien…

La galerie du photographe Do Anh Tuan à Hanoi 

Toute seule dans la petite pièce, je fais la rencontre de l’assistante du photographe, Do Anh Tuan. Très vite, elle me parle de l’auteur des clichés et me sort des piles de photos, tirées de caisses empilées dans les coins.

Des noirs et blancs très contrastés, des visages, un intérêt vif pour la vie des paysans, pour la multiplicité des ethnies qui peuplent le Vietnam.

Tout en m’offrant un des meilleurs thés japonais que j’aie goûté, elle me fait partager le parcours de l’artiste. Puis son visage s’illumine… Pourrais-je revenir dans quelques heures, à la nuit tombée? Le photographe est de retour d’un voyage, il sera là.

Comment ne pas trépigner d’impatience à l’idée de rencontrer un photographe aussi doué? Dès la nuit tombée, j’étais là, la tête et le calepin pleins de questions. 

Do Anh Tuan, une référence au Vietnam  

Do Anh Tuan est un photographe très connu et récompensé au Vietnam et certains de ses clichés ont été présenté en Europe dans le cadre d’une exposition collective d’artistes vietnamiens.

Il collabore avec plusieurs magazines vietnamiens et donne séminaires et leçons privées. 

> Rencontre avec l’artiste 

Do Anh Tuan était peintre et avait étudié la musique quand soudain en 1991, la photographie, qui n’était qu’un hobby, devient une passion à temps complet. Il me dit, un sourire en coin, qu’il recommencera à peindre quand il aura atteint l’âge sage de 70 printemps.

Il me confirme que ce sont bien ses concitoyens qui sont son principal sujet d’expérimentations. Le travail sur les différentes ethnies du pays le fascine. Il aime plus que tout ce qu’il appelle “la vie simple”.

Son travail sur le terrain l’emmène dans des endroits très peu fréquentés et une fois sur place, il lui faut du temps pour être accepté des villageois. Le fait qu’il soit Vietnamien est bien sûr un atout, mais la confiance doit toujours être gagnée, petit à petit.

Do Anh Tuan me raconte avec franchise que son travail parallèle de professeur à l’université n’est pas une mince affaire et que cela le maintient loin des villages qu’il aimerait photographier. Enseigner le métier aux jeunes est important me dit-il. Il conçoit ses séminaires et ses cours comme un devoir par rapport à la jeunesse vietnamienne. Il doit contribuer à élever le niveau artistique des étudiants vietnamiens.

Mais que cherche-t-il quand il va explorer les coins les plus reculés du Vietnam…? Il frotte ses étranges lunettes et demande à son assistante de bien traduire ce qu’il va me répondre. Je le soupçonne de s’énerver gentiment en vietnamien contre cette adorable assistante qui s’excuse de ne pas trouver les mots exacts en anglais… C’est important que je comprenne parfaitement ses intentions me dit-il…

Puis tout à coup, il sort son téléphone. Il a une soeur qui habite en France, il va l’appeler et elle va servir de traductrice! Je n’ose penser au décalage horaire…

Nous voici alors engagés dans une conversation surréaliste entre le Vietnam et la France, entre une assistante confuse à l’idée de ne pas pouvoir effectuer parfaitement la traduction et la soeur du photographe, à des milliers de kilomètres, me traduisant mot à mot les paroles de son frère.

Cette dernière m’explique qu’en tant qu’artiste, son frère est fasciné par les interactions humaines qui se jouent dans la vie quotidienne: il veut voir les relations, comment les gens s’aiment, comment ils vivent, et partager leurs sentiments le temps d’un cliché est pour lui un grand honneur. C’est aussi une curiosité culturelle qui le pousse à étudier sans relâche les 54 ethnies qui peuplent son pays. Chacune devient pour lui un univers à explorer et à retranscrire, le plus fidèlement possible.

Do Anh Tuan aime l’esthétique de la photographie mais il n’est fier de lui que quand il arrive à créer une oeuvre qui suscite une idée, quand la juxtaposition des expressions emmène le spectateur vers une réflexion.

www.doanhtuanphotography.com

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